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La compétitivité de l’UE : une thématique majeure pour les institutions européennes

L’Acte unique européen de 1986 avait fixé l’achèvement du marché intérieur pour le 1er janvier 1993. Près de trente ans après, les institutions européennes font le bilan et étudient des pistes de travail pour le renforcer et le faire évoluer. 

A la suite des échanges entre la Commission et le Conseil dans le courant de l’année dernière (voir article Stratégie de la Commission pour la compétitivité à long terme de l’UE| Europe (europe-en-nouvelle-aquitaine.eu)), les 27 Chefs d’Etat et de Gouvernement s’étaient réunis le 30 juin 2023 et avaient demandé un rapport sur l’avenir du Marché intérieur. C’est chose faite. Après six mois d’auditions et d’échanges, Enrico Letta, qui avait été mandaté pour mener ce travail, a présenté son rapport à la Commission et aux 27 Etats membres. L’ancien premier ministre italien y dresse une série de constats et recommandations pour rendre le Marché intérieur plus efficace, plus résilient aux crises, et pour renforcer la compétitivité des entreprises européennes et leur permettre de lutter contre la concurrence déloyale. 

L’approfondissement du marché des capitaux est considéré comme crucial pour être en mesure de financer l’innovation. Cela pourrait en partie passer par la mise en place d’une union de l’épargne et des investissements. L’UE est aussi invitée à initier des grands chantiers sur un marché intégré de l’énergie, sur un soutien encore plus appuyé à la production industrielle et plus particulièrement aux industries liées à la transition verte, ou encore sur l’approfondissement d’un marché commun de la défense. Concernant le marché des télécommunications, les travaux ont déjà commencé pour rattraper le retard européen dans ce domaine (voir Consultations publiques de la Commission européenne | Europe (europe-en-nouvelle-aquitaine.eu)).

M. Letta préconise la mise en place d’une "cinquième liberté", censée s’ajouter à celles valant pour les personnes, les biens, les services et les capitaux au sein du marché unique, qui échappent théoriquement aux frontières nationales. Cette nouvelle "liberté" serait applicable à la recherche, l’innovation, les données, les compétences, la connaissance et l'éducation.

Il reconnait également dans son rapport que la politique de l’UE de soutien au développement territorial (politique de cohésion) permet d'éviter des déséquilibres économiques et sociaux majeurs. Il estime qu’il faut renforcer le soutien aux régions en déclin ou en stagnation économique en s’appuyant notamment sur les gouvernements régionaux et locaux qui ont une connaissance approfondie des forces et des faiblesses de leur territoire et sont bien placés pour éviter les échecs de coordination entre les différents niveaux de gouvernance ainsi que pour s'engager avec les acteurs privés locaux. Dans la même dynamique, le rapport insiste pour que l'UE soutienne davantage les projets de coopération transfrontalière entre les acteurs publics et privés.

Enfin, dans le prolongement du SME Relief Package (voir article Nouvelles mesures en faveur des PME européennes| Europe (europe-en-nouvelle-aquitaine.eu)), le rapport souligne également que la reconnaissance d’une catégorie des entreprises de taille intermédiaire (ETI), sans en spécifier les seuils, permettra d'établir des normes plus adaptées, de favoriser leur croissance dans des conditions de concurrence équitables, en particulier dans les périodes de crise.

Il ne s’agit que de propositions de la part de M. Letta. Leur mise en œuvre concrète dépendra de choix politiques pris par les dirigeants européens. Les premières réactions ont néanmoins été positives. A la suite de leur réunion des 17-18 avril, les 27 Chefs d’Etat et de Gouvernement ont intégré dans leurs conclusions la nécessité de préparer un nouveau pacte pour la compétitivité européenne (EU competitiveness Deal) afin de combler les écarts en matière de croissance, de productivité et d'innovation" entre l’UE et les Etats-Unis, la Chine, le Japon, etc. Il est donc probable que ce sujet devienne un axe majeur du prochain "Agenda stratégique 2024-2029" du Conseil, et un fil conducteur du prochain mandat de la Commission. 

Rapport Letta « Much more than a market - Bien plus qu'un marché » 

Conclusions du Conseil européen des 17-18 avril 2024 (rubrique IV)